Épuisé - Joe Matt

Cette bande-dessinée autobiographique relate les pérégrinations d’un trentenaire solitaire, un loser qui passe le plus clair de son temps à mater des films pornos qu’il n’hésite pas à compiler afin d’obtenir une anthologie ultime du porno. Il a d’ailleurs déjà cumulé près de 184 heures de pornos sur une ribambelle de cassettes VHS. Il vit en colocation dans une maison, cloîtré dans sa chambre, il n’ose pas en sortir au risque de rencontrer les autres pensionnaires de la maison, même pour uriner. Ainsi fait-il sa petite commission dans le traditionnel bocal à pisse censé faire office de latrines.

                                            



Radin à l’extrême, il économise le moindre centime afin de faire fructifier son maigre capital. En fait d’économies, il n’en possède pas beaucoup, ne travaillant à ses dessins que de manières intermittente. Le gros de son labeur réside dans sa compilation de cassettes pornos dont un des truculents épisodes est retranscrit à travers plusieurs pages. Pour cet énergumène, le porno est sacré et la masturbation un sacerdoce, il s’adonne d’ailleurs à cette pratique pas moins d’une dizaine de fois par jour, devant ainsi fréquemment renouveler sa serviette à foutre, quitte à utiliser un ancien T-shirt pour faire sa petite affaire. Ce faisant, il tente de ne pas parasiter sa libido en pensant à ses sinistres colocataires ou aux moustachus au cul velu qui apparaissent dans certains des films  pornos qu’il regarde. D’autre part, on assiste à des réminiscences de son enfance ou de son adolescence, autant d’épisodes peu reluisants faisant parfaitement écho à sa situation actuelle.

                                        

Cependant Joe fréquente certaines personnes, à commencer par ses amis. Fidèles et factuels, Seth et Chester ne manquent pas de se moquer de leur ami et de ses rituels. Cette amitié vache se traduit à plusieurs reprises et c’est également un des axes de lecture de cette BD. Elle témoigne de la difficulté d’être en accord avec certains traits de caractère de ses amis. Les retranscriptions de dialogues entre ces personnages prennent d’ailleurs une bonne part dans cet ouvrage et ces derniers, si édifiants puissent-ils être, peuvent même paraître un peu longs. Mais Joe Matt lui-même semble faire une autocritique de son travail et conclure par un « Ce n’est même pas une histoire, c’est juste moi qui m’apitoie sur la pornographie. C’est de la branlette en bande-dessinée. […] Le lecteur va bien finir par se rendre compte que ça va nulle part… »

Les fans de porno et les masturbateurs compulsifs sauront se retrouver dans ce bijou d’auto-dérision.

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