Angot par Libération, le glauque et l'inceste comme littérature branchouille




On le sait, la presse écrite va mal. Et quand elle n’écrit pas mal ou vite, il n’est pas rare de se trouver en présence de Unes quelquefois racoleuses afin d’attirer le chaland. Pour son numéro du 4 septembre 2012, Libération n’a pas manqué d’audace en considérant, en première page, le dernier livre de Christine Angot « Une semaine de vacances » comme étant rien de moins que « Le chef-d’œuvre de la rentrée ». Faisant fi des romans ayant le vent en poupe lors de cette rentrée littéraire (Deville, Adam, etc.) ou des auteurs plus discrets (Louise Erdrich, Richard Powers, Jim Harrison) ce quotidien décide de frapper un bon coup dans la fourmilière et consacre pas moins de quatre pages à l’auteure afin de légitimer les éloges concernant son dernier ouvrage. Seulement, la fourmilière a déjà maintes fois été maltraitée et lui rejouer sempiternellement le coup du livre qui choque ne fait plus vraiment son effet.

Car les termes ‘Angot’ et ‘polémique’ sont tellement liés l’un à l’autre que les énoncer dans une même phrase relève du pléonasme pur et simple. Le pitch, on le connaît. Le livre traite de l’inceste, bla bla bla, sujet tabou, bla bla bla, effraye le bourgeois, bla bla bla dans un style sans pareil, etc. Les journalistes enthousiastes de Libé s’émerveille aisément de cette écriture de l’insoutenable.

 

Fleuris nichons

Pourtant, on pourrait ne pas être forcément rebuté par une telle lecture. La première page, si elle ne manquera pas de désarçonner certains, elle pourrait bien faire pouffer d’autres. Tout commence dans des toilettes :

« Il est assis sur la lunette en bois blanc des toilette, la porte est restée entrouverte, il bande. Riant à l’intérieur de lui-même, il sort de son papier une tranche de jambon blanc qu’ils ont acheté à la superette du village, et la pose sur son sexe. »

Après cette délicate mise en bouche sponsorisée par Fleury-Michon, la jeune fille (la fameuse victime de l’inceste) s’accroupira et mangera un peu de cette tranche sans couenne et allégée en sel. S’en suit une interminable description de fellation relatée par le menu, et c’est là que la machine dévoile son mécanisme et ses faiblesses. La description n’est pas ici un art mais une composante bien lourdingue du style de ce court roman. Si Angot nous a quelque peu lâché les basques avec ces phrases de trois mots noyées sous une flopée de points annihilant tout intérêt de la ponctuation, ses descriptions répétitives prennent la relève. D’un autre côté, Angot nous  fait part de son un sens de la comparaison au lyrisme débridé. Ainsi assimile-t-elle logiquement des seins à des pamplemousses ou encore une verge à une tétine. Que d’imagination !

Finalement, ce qui pourrait exciter les plus pervers ou écœurer les plus pudibonds dans un premier temps finit par ennuyer, tout simplement. Le marasme descriptif à répétition (suce/gland/seins/cul) assomme, si bien que l’on peine à y trouver un intérêt. Cependant, le récit se révèle plus saisissant lorsque l’on sort de ce contexte malsain, que l’on goûte un peu à l’air de dehors, que l’on s’enquiert du temps qu’il fait ou des personnalités en présence. Mais ces phases ne durent pas et on revient constamment aux turpitudes glauques.

 
 

L’inceste, toujours

L’inceste, est un thème récurrent dans l’œuvre de Christine Angot, et inutile de verser dans la psychologie de comptoir afin de saisir les raisons de ce leitmotiv. « Une semaine de vacances », c’est l’histoire de ce type qui aime se faire sucer et se faire appeler papa. C’est un homme de principe qui ne veut pas déflorer la fille, mais qui ne renâcle pas à l’idée de lui éjaculer dans la bouche ou de lui pourfendre l’anus.

Si certains critiques branchouille y voient un livre social, engagé quelque part (même si on ne voit pas bien où), il est difficile de ressentir autre chose qu’un indécrottable ennui à la lecture de ce roman dont la densité (130 pages avec des marges de trois centimètres) n’a rien à envier au rendement habituel d’Amélie Nothomb.

Cependant, si Libé dit que c’est bien, c’est que quelque part, c’est forcément bien. Eric Loret, thuriféraire qui fait rire note d’ailleurs :

« Personne n’a envie de passer pour un cuistre dépourvu de goût parce qu’il trouve Angot idiote, haineuse et totalement dépourvue d’humour. »

Avec un peu de mauvaise foi, on tenterait presque l’expérience, si la cuistrerie ne résidait pas du côté de ceux qui encensent l’écrivaine autoproclamée maudite.

Toujours est-il qu’avec la sortie de ce livre, on se fait toujours moins de soucis pour le compte bancaire de Christine Angot que pour les goûts littéraires de Nicolas Demorand. L’onanisme intellectuel a encore de beaux jours.

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