Martin de La Brochette
Martin de la Brochette est issu
d’une petite famille versaillaise, huppée, bien sous tous rapports, bref, blindée
de maille. Il s’amuse de ses origines bourgeoises d’autant plus qu’il est le
vilain petit canard de ce tableau parfait. Si ses frères et sœurs, furent de
brillants étudiants, lui a sérieusement ramé pour obtenir ses diplômes. Là où
ils font sérieux et propres sur eux, lui ne représente que le petit gros un peu
en retard. Ainsi n’usurpe-t-il pas son surnom de « Boulette ».
« Mes deux frères et ma
sœur, beaux et brillants dans leurs études, n’arrangent pas ma situation. Ils
sont légitimes dans leurs statuts de bâtons de relais intergénérationnels, dont
les parents rêvent tous. Ils sont les fruits d’une passion lointaine, je suis
le gros pépin. Ils sont la fierté de la famille, j’en suis la honte.
Ils sont les bien-aimés, je suis
le mal-aimé. »
Ce serait à chialer si le
protagoniste lui-même ne s’amusait pas de cette situation. Ce qu’il est ne lui
déplait pas et c’est avec une verve assassine qu’il s’amuse à croquer le reste
de sa famille. Car s’il n’est pas de leur monde, eux ne sont pas du sien.
Ainsi la première à se faire
déboulonner est sa mère :
« J’ai constaté depuis fort
longtemps que, pour préserver les apparences en société, on n’hésite pas dans
mon milieu à déborder d’imagination, surtout ma mère. Cela mérite bien des
combats pour que le vernis du camouflage d’une famille d’apparence réussie ne
s’écaille sous les projecteurs de la comédie humaine. Ma chère mère aime
les honneurs, l’argent et tout ce qui brille, les compliments des hommes jeunes
ou vieux, les regards envieux des femmes sur son physique avantageux qui la
fait exister. »
Ces quelques lignes constituent
le portrait de celle qui représente désormais le pilier central de cette
famille du paraître dans la mesure où le père, décédé, ne peut plus tenir son
rôle. Martin continue donc sur sa génitrice :
« Elle a la maîtrise de son
sourire, qu’elle réserve à ses sorties, gère parfaitement son image. Incapable
de se simplifier la vie, elle réussit brillamment et sans effort à la
compliquer. La reine des phrases toutes faites, du copier-coller à prétention
intellectuelle et des certitudes, pense séduire par son intelligence, ignorant
que sa petite entreprise se résume à sa belle gueule et au fait qu’elle est
bien foutue pour son âge, et que surtout, surtout,
son entourage craint ses humeurs imprévisibles. »
Sœur et frères ne détonnent guère
dans cet idéal portrait de famille. Seule Vanessa, femme de Louis (son frère),
en impose en termes de fausse note.
« Quand Louis a présenté à
Maman pour la première fois sa future femme en annonçant
fièrement : « Vanessa Deblagnac », ma chère mère comprit
bien évidemment « Vanessa de Blagnac ». Plus tard, quand elle sut,
elle encaissa douloureusement le gouffre que représentait pour elle cette
majuscule attachée à ce nom d’un seul tenant. De surcroît, elle aurait préféré
qu’elle se prénomme Claire ou Isabelle… Notre mère se console en se disant
qu’elle a du chien. Moi je pense que c’est une chienne et Dieu sait si j’aime
les bêtes. »
« Ambassadrice et
porte-parole des cons à elle toute seule, si Vanessa était un feu d’artifice,
elle serait le bouquet final. On devrait la labelliser d’inutilité publique, la
classer monument historique à visiter pendant les journées du patrimoine :
elle remporterait un franc succès. »
Martin a un rêve, celui de
devenir boucher. Encore faut-il avoir les tripes (façon de parler) d’annoncer
la curieuse nouvelles à cette famille tirée à quatre épingles. Pas question
pour Martin de finir comptable. Lui veut triturer la tendre chère, celle de sa
viande, mais également celle de sa femme, Solange, dont les rotondités
éveillent sa libido au plus haut point.
Si la seconde partie du roman est
plus traditionnelle que le début qui commence sur les chapeaux de roue, le
livre vaut toutefois son pesant de cacahuètes ne serait-ce que pour le
descriptif familial effectué par le protagoniste.
A noter que Thierry des Ouches
semble avoir fait des vaches un sujet de prédilection puisqu’il a préalablement
publié un ouvrage de photographie ayant pour thème l’espèce bovine.
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